L'histoire de Staline ( le petit père du peuple) et son rôle dans la seconde guerre mondiale
Staline arrive au pouvoir
Lénine a en effet perçu le rôle stratégique que prend le poste a priori formel de "secrétaire général du Comité central" quand la bureaucratie se renforce. Cela n'échappe pas non plus à Staline. Après la mort, en janvier 1924, du dirigeant historique de la révolution bolchevique, c'est un atout fondamental dans la course à la succession. D'autant plus que les dirigeants, trop soucieux d'évincer Trotsky, ne prennent pas garde aux avertissements de Lénine concernant Joseph Staline. Ce dernier se positionne tour à tour à droite, puis à gauche. Ainsi, il élimine ses adversaires les uns après les autres, s'alliant avec les ennemis d'hier pour faire tomber un allié de la veille : Trotsky, Zinoniev ou encore Boukharine et Rykov chutent successivement, laissant le champ libre. Staline les élimine définitivement quelques années plus tard dans les procès de Moscou. Parallèlement, Staline use d'un discours simplificateur qui lui donne l'agrément des nouveaux arrivants du Parti, souvent moins cultivés et d'origine plus modeste que les dirigeants historiques de la révolution. Il se clame véritable successeur orthodoxe de la pensée de Lénine, et s'emploie à faire oublier les désaccords des dernières années. Par ailleurs, il s'appuie fortement sur la bureaucratie – qui inquiétait Lénine – qu'il peut en partie contrôler. En 1929, Joseph Staline occupe tous les postes stratégiques et a évincé ses ennemis. Il les remplace par des proches, des collaborateurs fidèles et dociles. Mais Staline ne s'est pas simplement imposé dans les cercles de pouvoir, il devient le "vojd" (le guide) du peuple et amorce le culte de la personnalité. L'URSS est mûre pour accueillir le stalinisme.
Les millions de morts de Staline
Deux grandes actions engagées successivement en 1928 et 1930 illustrent la politique nouvelle que l'on nomme par la suite stalinisme : le premier plan quinquennal et la création du goulag. L'objectif des plans quinquennaux est de rattraper l'immense retard économique de l'URSS : l'industrialisation doit se faire à marche forcée. Ainsi, la NEP (Nouvelle politique économique) est supprimée et l'agriculture doit accepter une profonde réforme : la collectivisation de masse. En effet, pour permettre à l'industrie de fleurir, Staline veut s'appuyer sur un large effort du monde paysan. Mais ce dernier n'adhère pas avec enthousiasme à cette nouvelle économie. Les kolkhozes, immenses fermes d'Etat, sont perçus comme un nouveau servage. Joseph Staline démontre qu'il n'est pas surnommé "l'homme d'acier" sans raison, et qu'il n'a pas perdu la fermeté qui le caractérisait lors de la guerre civile. Les ennemis de la réforme sont immédiatement assimilés aux ennemis de la révolution et donc du peuple. Parmi eux, les "koulaks" sont particulièrement mal considérés. Une véritable guerre leur est livrée, donnant tout son sens au Goulag, lieu de déportation des ennemis du régime. Aux milliers d'exécutés et de déportés, s'ajoutent les millions de morts de la grande famine de 1932-1933. Staline, au courant de la situation, ne faiblit pas : la paysannerie se soumet.
Après avoir écarté dans les années 1920 ses adversaires potentiels dans les cercles restreints du pouvoir, Staline engage en 1936 la mise au pas de toute la société. C'est la période des grandes purges. Des milliers de fonctionnaires sont remplacés, des centaines exécutés dans tous les domaines de l’État et notamment dans l'armée. Les bolcheviques de la première heure servent d'exemples dans les procès de Moscou. Mais les actions staliniennes ne se limitent pas à la bureaucratie et aux élites : de vastes campagnes, aidées par une juridiction d'exception, permettent l'arrestation de plusieurs centaines de milliers de personnes. C'est ce que l'on nomme la "Grande Terreur". Pendant longtemps, le rôle de Staline a été minimisé dans ces actions. Mais l'ouverture des archives après la chute de l'URSS a permis de démontrer son engagement. D'ailleurs, il n'hésite pas, durant cette période, à autoriser l'arrestation et l'exécution de membres de sa belle-famille (de son premier mariage). A la fin des années 1930, entre 600 000 et 700 000 personnes auraient été exécutées tandis que l'URSS compte entre 5 et 10 millions de prisonniers politiques. Joseph Staline a mis en place un système totalitaire.
Staline et la Seconde Guerre mondiale
Pendant qu'il tient le pays d'une main de fer, Staline doit pourtant s'inquiéter du contexte international et notamment de la montée des fascismes, violemment anti-communistes. Il cherche tout d'abord un soutien du côté des démocraties européennes, notamment l'Angleterre et la France. Si la politique intérieure est à l'heure de la répression, les PC européens sont invités à collaborer avec les démocrates, tandis que l'URSS rentre dans la SDN en 1934. Mais URSS et démocraties occidentales sont animées de la même méfiance mutuelle. Chacun espère qu'Hitler enverra ses forces contre l'autre. Non convié à la conférence de Munich, Staline se tourne vers Hitler. Il envoie Molotov signer le Pacte germano soviétique le 23 août 1939. Dès lors, Joseph Staline fait confiance à Hitler, ou tout du moins espère retarder l'échéance de la guerre, certainement conscient du retard technologique de l'URSS. Cela lui permet notamment d'annexer une partie de la Pologne et les Etats baltes, mais aussi de mesurer la faiblesse de son armée contre la Finlande.
Ainsi, le 22 juin 1941, malgré les alertes récurrentes données par les renseignements, l'URSS est prise au dépourvu face au lancement de l'opération Barbarossa. Une grande partie de sa flotte aérienne est détruite au sol avant même que l'armée ait eu le temps de réagir. Staline met du temps avant de donner des ordres. La légende veut qu'il soit resté prostré plusieurs jours avant de réagir. En fait, il semble avoir pris le temps de la réflexion. Mais, de ce fait, l'armée recule, payant la perte de ses élites lors des grandes purges. Pourtant, cette défaite désastreuse est bientôt transformée au bénéfice du vojd. Face à la barbarie des nazis, Staline ressuscite et encourage le nationalisme grand russe. Refusant de quitter la ville de Moscou en péril, il s'identifie à la patrie et démontre une fermeté exemplaire. Les soldats partent au combat en chantant à sa gloire. Mais c'est aussi avec cette même fermeté qu'il refuse d'échanger le Maréchal Paulus contre son fils prisonnier des Allemands. Celui-ci se suicide pendant sa détention. En 1945, devenu maréchal, Joseph Staline bénéficie d'un nouveau statut dans ses frontières comme à l'extérieur : il est l'homme qui a sauvé le peuple et celui qui a battu Hitler. La Seconde Guerre mondiale lui a permis de renforcer le culte de la personnalité et de centraliser encore plus de pouvoirs. Le "père des peuples" est presque considéré comme un dieu, il est au faîte de sa puissance et de sa gloire.
Opération Barbarossa : invasion de l'URSS par le IIIe Reich
Le 22 juin 1941, le IIIe Reich de Hitler tente d'envahir l'URSS de Staline. L'opération Barbarossa est lancée. Elle ouvre à l'Est le front aux combats les plus sanglants de la Seconde Guerre mondiale.
Staline et la guerre froide
Ainsi affermi, Staline replonge le pays dans la terreur durant les dernières années de sa domination. Si la guerre a permis une certaine libéralisation du régime, le retour à la paix favorise le retour à l'ordre. De surcroît, la guerre froide justifie un durcissement de l'idéologie. "L'impérialisme", synonyme de capitalisme, redevient l'ennemi premier, tandis que Tito remplace Trotsky dans le rôle du "déviationnisme". De nouvelles arrestations ont lieu, comme lors de l'affaire de Leningrad. Staline pousse la logique totalitaire jusque dans ses extrémités. La culture, cible traditionnelle, est à nouveau sommée de se plier aux dogmes du réalisme. Réhabilité pendant la guerre, Chostakovitch, comme de nombreux artistes, est à nouveau condamné pour des tendances "bourgeoises" et "cosmopolites". Même la science doit avoir des conclusions convenables et arrangeantes pour l'Etat. Ainsi, Joseph Staline donne son soutien aux thèses de Lyssenko qui affirment que les acquis sont héréditaires.
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Mort de Staline
Staline est de plus en plus omniprésent dans toute la vie de l'URSS, mais le personnage est de moins en moins visible. Depuis que sa seconde femme s'est suicidée en 1932, il semble avoir renoncé à un nouveau mariage et à une vie sociale "classique". Il vit essentiellement entouré de ses très proches collaborateurs. Il faut attendre septembre 1952 pour que le vodj daigne organiser le XIXe Congrès du Parti. Il s'est écoulé treize ans avant que se réalise un Congrès qui, jusqu'à la fin des années 1920, était annuel. Joseph Staline y fait une apparition courte où il annonce des réformes des institutions et accuse ses plus proches collaborateurs, comme Molotov, de connivence avec l'ennemi impérialiste. Quelques mois plus tard, la Pravda annonce un nouveau scandale : c'est le complot dit "des blouses blanches". L'appel à la vigilance bolchevique et aux délations prédit de nouvelles purges massives. La nouvelle cible de Staline est le "cosmopolitisme", souvent synonyme de judéité. Nourrissant une paranoïa grandissante, Staline suit cette affaire de très près jusqu'au 5 mars 1953, jour où il meurt d'une attaque cérébrale. Les funérailles de Staline sont grandioses, à la hauteur du culte de la personnalité cultivé de son vivant. Les communistes du monde entier manifestent pour lui rendre hommage. Pourtant, en quelques mois seulement, les portraits de Staline disparaissent progressivement des murs soviétiques. En 1956, Khrouchtchev fait un rapport secret sur les excès de l'ancien dirigeant lors du XXe Congrès du PCUS. C'est le début de la déstalinisation.
Joseph Staline a en effet régné dans le sang. Entre les arrestations, les déportations, les exécutions massives et la famine de 1932, les victimes du régime se comptent en millions. Face à un tel bilan, on compare souvent Staline et Hitler, les deux bourreaux du XXe siècle et les créateurs d'un nouveau type de régime défini comme "totalitaire" par la philosophe Hannah Arendt. Dans le régime nazi comme dans le stalinisme, l'idéologie imprègne toutes les couches de la société et l'individu est presque nié au profit du "Volk" (le peuple) d'un côté et de la cause communiste de l'autre. Les outils de contrôle, et notamment répressifs, sont similaires : ainsi, le Goulag est l'équivalent du camp de concentration. On peut également souligner l'admiration d'Hitler pour la capacité de Staline à soumettre la paysannerie, et l'antisémitisme manifeste de Staline à la fin de sa vie. Toutefois, ce dernier se distingue par sa capacité à se maintenir au pouvoir pendant 25 années. Pouvoir qu'il cherche à centraliser en déléguant le moins possible. Les divergences idéologiques sont également indépassables. Et, s'il a usé de déportations très ciblées sur certains peuples, Staline n'a jamais mis en place de système d'éradication systématique d'une population similaire à la Shoah. De surcroît, s'il a symbolisé la terreur d'un régime meurtrier, il fut aussi l'artisan de l'industrialisation très rapide de son pays, une avancée payée au prix fort.